mardi 23 avril 2024

Averse de vers


"Je veux une averse d'étoiles sur les villes sales,

des arbres qui dansent dans les pas fatigués des passants,

le tournesol d'une robe jaune sur la grisaille des tristesses,

le souffle pur d'une terre haute,

l'eau glacée d'un torrent éclatant de rire,

des étincelles de nuit faisant battre le cœur des mots pour nettoyer

celui des hommes, un petit matin clair, irrévérencieux, insolent, confiant,

où des fées en espadrilles font le ménage du jour."

Ile Eniger


peinture: Rubaldo Merello 1872-1922 / Ulivi a San Fruttuoso 1915

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lundi 22 avril 2024

Faire la paix avec la mort

 FAIRE LA PAIX AVEC LA MORT…

♥😊♥
Certains maîtres Zen distinguent
La Grande mort de la petite mort…
La petite mort est la mort du corps...
La Grande mort est la vraie mort :
Celle de votre nom, prénom
Et de tout ce qui se cache derrière
Votre identité, votre monde intérieur
Incluant vos rêves, cauchemars
Espoirs et désespoirs…
En un mot, l’effacement de vous-même !
Sous quelque forme que vous puissiez vous imaginer !
La mort du corps n’est rien
Qu’un changement de peau
En particulier si vous croyez
Si vous vous accrochez
À l’idée-bouée de sauvetage
Que vous continuez après
Que la réincarnation existe, etc…
La vraie mort est terrifiante
La mort du corps, au pire
Un mauvais moment à passer…
Faire la paix avec la mort
Implique
Faire la paix avec votre disparition complète…
Comprendre et accepter avec le sourire
Que dans peu de temps
Vous ne serez plus même un souvenir
Dans la mémoire de personne…
Le corps physique
Avec le cerveau et son extension, les sens
Est l’équivalent d’un casque de réalité virtuelle
Qui plonge l’esprit que vous êtes
Temporairement
Dans un monde qui « apparait » matériel
Jusqu’à son obsolescence programmée…
Si le fœtus savait ce qu’est la naissance
Disait Charlie Chaplin
Il paniquerait…
La naissance est un passage
La mort, un autre passage…
Mais l’esprit qui retrouve sa forme
Après la disparition du corps
Est temporaire lui aussi…
Il peut faire plusieurs aller-retours
Ou voyages matériels ou spirituels
Mais au moment où il réalise
De façon claire et définitive
Qu’il n’est qu’une autre forme éphémère
Du Grand Silence Éternel
Il disparait lui aussi
Ne laissant aucune trace derrière
Dans le Grand Silence…
C’est la Grande mort !
Aucune forme n’est éternelle !
Physique, spirituelle, mentale, astrale
Toute forme, quelle qu’elle soit
Est éphémère…
Cherchez ce qui est éternel
Dans les profondeurs de votre être
Touchez le « sans forme »
Sans identité aucune…
Même l’océan d’amour
Que vous trouverez sur votre route
N’est pas le bout du chemin !
Dans les grandes profondeurs
Vous êtes un potentiel d’énergie infini
Conscient
Un big-bang à venir de créativité !
Une liberté magique !
Au creux de votre éternité
Sans nom, sans forme
Vous êtes de la même nature
Que la fourmi, que le soleil
Que l’ombre du renard sur la neige
Que les pas de tous les Bouddhas
Sur les plages de l’espace-temps…
Abandonnez-vous avec ivresse
Au Grand jeu divin
Au travers des multiples joies et douleurs
Elles sont toutes temporaires…
Laissez-le vous transporter
Vous porter à travers tous les mondes
Possibles et impossibles
Jusqu’à la Source silencieuse
Magique
Mystérieuse
Que vous êtes de tout temps
De toute façon
En dehors de l’espace-temps…
Préparez-vous à la Grande mort
À la fusion définitive
Avec le cœur silencieux de toute chose…
♥♥♥

Claude Leclerc

Image : « Flight », Carl Bergstrom CC , Seattle, Washington, mars 2018.

dimanche 21 avril 2024

« La vie est un collier de perles »


Après avoir parlé, la personne victime d’abus peut ressentir un immense soulagement. Enfin, elle a été entendue. Enfin, les faits ont été reconnus. Enfin, la voilà libérée de ce poids si lourd qui pesait sur elle et qui la détruisait depuis de nombreuses années. Mais, en même temps, elle s’est entièrement construite avec et autour et à côté de ce trauma. Si on imagine l’abus comme un obus qui s’est fiché violemment en elle, on se rend compte de l’impact que cela a pu avoir en son psychisme, en son âme, en sa vie. Il suffit de penser aux trous de bombes que l’on observe encore dans nos campagnes. Parler a donc non seulement laissé en elle des éclats bien tranchants, mais a en plus créé un vide, un gouffre ingérable.

Un travail d’orfèvre

Commence alors, pour le patient et son thérapeute, un travail long et douloureux, un travail d’orfèvre. Comme l’expliquait le médecin général et professeur de psychiatrie Louis Crocq, mon maître, il faut que la personne parvienne à faire un « récit autobiographie » de son existence. Ce n’est que lorsque la parole va permettre au trauma d’être intégré à la vie, à l’être même de la personne, que peuvent poindre les bénéfices d’une liberté retrouvée.

Je dis souvent à mes patients que la vie est un collier de perles : « Nous allons les enfiler les unes après les autres. Certaines seront magnifiques, d’autres toutes noires. Celles-ci ne redeviendront jamais blanches, mais elles font partie du collier. Il faut l’accepter. Cela ne veut pas dire accepter l’innommable, mais accepter de vivre malgré et avec l’innommable qu’il y a eu en votre vie. » La personne victime ne parviendra peut-être jamais à donner un sens à son vécu, mais, en prenant son temps, en creusant au plus profond d’elle-même, en acceptant de cheminer sur des sentiers jusqu’alors inconnus, en se détachant du regard des autres, elle rencontrera une source qui l’autorisera tout simplement à vivre.

Isabelle Chartier Siben 

source : La Vie

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samedi 20 avril 2024

Embarquement

 Il y a des jours où les expressions les plus populaires et les découvertes scientifiques les plus récentes semblent se faire écho.

« Mondialisation oblige, nous sommes tous dans la même galère » et il semblerait que dans la soute de notre navire planétaire, il y ait quelques bombes atomiques ou à retardement.

« Nous sommes embarqués » disait Pascal, mieux « nous sommes intriqués » dirait la physique quantique. Ce n’est pas une question de vouloir, même pas de pulsions, mais d’ondes et de particules.

Savoir cela devrait rendre dérisoires nos avis contraires, nos luttes assidues pour prendre ou garder le pouvoir, pour être le premier ou le dernier à avoir raison. Nos déterminismes se moquent bien de ces « je », de ces « jeux » puérils.

Nous sommes dans la même galère, embarqués, intriqués… et alors ?

Savoir cela suffirait-il pour que nous descendions ensemble dans la cale du navire planétaire, pour désamorcer ce qui est prêt et programmé pour l’explosion ?

Descendre ensemble dans la cale, c’est-à-dire dans notre intériorité, là où nous sommes un, interreliés, intriqués. Là où il n’y a plus d’Iraniens, d’Israéliens, de Palestiniens, de Russes, d’Ukrainiens, de Français, d’Américains… mais seulement l’humanité une, silencieuse et blessée… Là où il n’y a plus de veaux, de vaches et de cochons mais des animaux malades de la peste, avides de guérison plutôt que d’extinction….

Est-ce possible ?

Vœu désuet, vaste utopie ou expérience simple et triviale :

Le chat et la souris, dans leur faim de survivre, ne savourent-ils pas le même fromage ?

Mais où est la faim, où est le fromage ?

Ne demandez pas à la vie : « Où es-tu ? ».

Elle est là, je suis là, tu es là, nous sommes là…

Allons-y !     

  Jean-Yves Leloup, Avril 2024

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vendredi 19 avril 2024

Performance ou robustesse

 


Je vous conseille l'écoute de l'interview d'un français sur une chaîne belge et qui parle de pause café !

L'article est ici

Olivier Hamant propose plutôt de passer de l’abondance matérielle à l’abondance relationnelle.

Si vous n'arrivez pas à écouter l'audio, vous pouvez la trouver ici.






"La croissance donne l’impression d’abondance alors qu’elle crée la pénurie."


"Nous sommes dans une secte de la performance : on n’est plus capable de la questionner alors qu’on sait scientifiquement qu’elle induit une dégradation, c’est le burn-out des humains et celui des écosystèmes."

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jeudi 18 avril 2024

lignes flottantes



Extrait de Tu dis délivrer la lumière (Pourquoi viens-tu si tard ?, 2021)


Nos souffles puisent à la source

qui précède la fièvre

soutenue par le bond de lumière
tu pousses la question
qui t’élève déjà vers la pointe des vagues
ton corps est le navire

le silence me berce encore
je cherche son assise
dans la rumeur inquiète
repasse mes contours sur les lignes flottantes

Sabine Dewulf

Tableau : Le souffle de la mer de Guillaume Barazer

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mercredi 17 avril 2024

Ecole de la souplesse

 L’école du saule (par Cécile Bolly)


Il était une fois, il y a très longtemps, dans un pays très loin d'ici, un homme qui marchait. Il marchait parfois vite, parfois lentement, sous le soleil ou dans le vent. Il quittait la Chine, où il venait d'apprendre les arts martiaux, et rentrait chez lui. En chemin, il pensait à la technique qu'on lui avait enseignée. Il sentait qu’il y avait sans doute quelque chose à associer à cette technique ; quelque chose de plus intérieur, une réflexion philosophique, peut-être, ou un fondement spirituel. Quelle est, se demandait-il, la force qu’il faut opposer à la force pour la combattre ? Se retirant longuement dans un temple zen afin d'y méditer, il se promène un jour dans le grand jardin alors qu'il y neige abondamment. Son attention est subitement attirée par le bruit d’une branche de cerisier qui casse sous la neige malgré sa robustesse. Un peu plus loin, alors qu'il s'approche d’un saule, il voit la neige glisser silencieusement à terre et la branche pourtant fragile du saule se relever, indemne. À ce moment-là, son esprit s'éclaire, son âme s’éveille. Il comprend que ce n’est pas la force qu'il faut opposer à la force, mais bien la souplesse ; que ce n’est pas la lance qu’il faut opposer à la lance, mais bien la main vide et le cœur pacifié. Depuis lors, on attribue à ce médecin japonais, Shirobei Akiyama, la création de l'école du saule, Yoshin-ryu, qui a donné naissance au judo et au ju-jitsu. Cette école du saule, ou plus précisément cette école de l’esprit du saule, est ma préférée ! Que ce soit dans mon travail de médecin, dans celui de vannière ou à d’autres moments encore, je me sens avant tout dans la recherche du geste juste.

Le saule est un des arbres qui permet de faire de la vannerie. Les branches de saule une fois coupées deviennent des brins d’osier, que des mains tissent pour réaliser un panier. La beauté de celui-ci dépend de la qualité de chaque geste effectué, qui n’est pas seulement un geste technique, mais une trace de l’interdépendance entre différentes formes du vivant. Au moment de l’imaginer ou même de le créer, nul ne sait ce que ce panier pourra contenir. Dans mon travail de médecin et de psychothérapeute, la recherche du geste juste est tout aussi importante. Pour moi, elle se manifeste avant tout dans la qualité de l’écoute que je peux offrir à l’autre. Qu’est-ce qu’écouter, si ce n’est offrir un contenant, être contenant, afin que ce moment de rencontre puisse accompagner, relier, soutenir, contenir, protéger parfois.

Plus largement, quels que soient notre place, notre rôle, notre fonction, l’école de l’esprit du saule nous apprend donc la souplesse, la disponibilité, l’attention à tout être vivant. Elle nous rend ainsi capables de tisser des liens solides et porteurs de sens, des liens qui libèrent.

Extrait du livre "La puissance des liens" de Ilios Kotsou, Caroline Lesire, Christophe André, Abdennour Bidar, Fabienne Brugère, Rébecca Shankland, Matthieu Ricard

mardi 16 avril 2024

L'autre peut me nourrir...

 


Il est extrêmement rare de rencontrer quelqu’un, qu’on voie beaucoup de monde ou qu’on soit ce qu’on appelle un solitaire. La plupart des gens rendent très difficile de les rencontrer parce qu’ils ne sont pas vraiment dans leur parole ou parce qu’ils sont sans âme. Je fais toujours à l’autre le crédit de la nouveauté incroyable de son existence, mais ce crédit va s’user si l’autre a gâché cette merveille-là pour devenir comme tout le monde. Comment parler avec personne ? C’est impossible.

Parfois le désir de partager est si fort que je vais quand même tenter ma chance mais souvent en vain. Les opinions ne m’intéressent pas. Ce qui me touche, c’est quand l’autre met tout le poids de sa vie dans la balance des mots et que sa pensée s’appuie sur ça. Pour ma part, j’ai parfois l’impression d’être totalement incapable d’aimer, et en même temps d’aimer plus que personne. Je vois très peu de monde, mais je peux être indéfiniment avec l’autre quand il est là. Quand je suis né, on m’a proposé le menu du monde, et il n’y avait rien de comestible. Mais quand l’autre est vraiment avec moi, je peux manger : je bois une gorgée d’air, je mange une cuillerée de lumière.

~ Christian Bobin

La lumière du monde 

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lundi 15 avril 2024

7 maintenant...

En ce dimanche, pour moi jour de repos, je vais jouer à réfléchir
Je vais essayer sept fois, autant que les jours de la semaine.
1. Pas d'avant, pas d'après, tout est MAINTENANT.
2. Si ce n'est pas MAINTENANT, quand ?
Si ce n'est pas ICI, où ?
Si ce n'est pas TOI, qui ?
3. Nous ne pouvons pas changer le monde, mais nous pouvons commencer à le changer. (Ne divisons pas, unissons-nous ! )
4. La mort n'est qu'un changement
La vie ne finit jamais.
5. Nous ne vivons pas dans un pays mais sur une planète.
6. Ce que tu donnes, tu le donnes.
Ce que tu ne donnes pas, tu le retires.
7. ET MAINTENANT, une vérité : notre squelette n'a ni pensées, ni sentiments, ni désirs, il n'a pas de vie mais il existe. C'est notre meilleur ami.
Du sang dans le sang.
Âme dans l'âme.
Temps dans le temps.
Os dans la chair.
Amour dans mon câlin pour toi.

Alexandre Jodorowsky

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dimanche 14 avril 2024

Etre au bon endroit et au bon moment


Mes chers amis,

Hier lors de la méditation, j'ai fait une petite introduction sur la conséquence de nos actes dont nous sommes souvent bien ignorants.

Nous pouvons en effet réaliser que tous nos actes ont des conséquences dans cette vie, mais aussi des conséquences beaucoup plus profondes dans le courant de notre esprit.

Quand nous réalisons que nous ne sommes pas ce corps qui est une apparence changeante d'instant en instant, donnant des sensations toujours changeantes, nous pouvons commencer à réaliser notre dimension spirituelle et cela peut nous amener à prendre conscience de ce qu'on peut appeler l'esprit.


En effet tout ce que nous percevons passe par l'esprit, par la conscience. Comment en effet pourrions nous percevoir quelque chose dont nous ne sommes pas conscients, ne fut-ce qu'en pensée ?

Tous nos actes plantent des graines dans le courant de l'esprit. Ces graines peuvent se développer si les conditions sont favorables.

Cette prise de conscience pourrait nous amener  à mesurer qu'à chaque instant, par nos réactions à ce que nous percevons, nous créons des conditions qui vont entrainer la manifestation de nos tendances qui sont liées à ces graines plantées dans le courant de l'esprit.

Nous ne sommes pas responsables de ce qui arrive, mais nous sommes responsables de ce que nous en faisons, et ce que nous en faisons est la cause des graines qui vont être plantées. Nous prenons alors conscience que fondamentalement nous sommes responsables de l'avenir, des tendances que nous créons par notre action dans l'instant.

Avec ma profonde amitié, je vous souhaite une bonne méditation à vous tous.


Philippe Fabri

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samedi 13 avril 2024

Pourquoi notre cerveau adore les mauvaises nouvelles


Faits divers sordides, catastrophes naturelles, conflits en tout genre… Notre cerveau raffole secrètement de ce genre d’informations ! En cause : le biais de négativité qui entretient notre goût inavouable pour les mauvaises nouvelles. (Par Anne Guion)

Pourquoi les médias ne parlent-ils que des trains en retard et jamais de ceux qui arrivent à l’heure ? La réponse à cette question est simple : parce que tout le monde préfère les mauvaises nouvelles aux bonnes ! Ou plus précisément, nous sommes tous – journalistes compris – victimes du biais de négativité, une tendance spontanée de notre cerveau à être attiré par les informations négatives. Cela s’explique par l’évolution.


Pour pouvoir éviter le danger et maximiser nos chances de survie, notre cerveau est particulièrement sensible à tout ce qui pourrait nous menacer. Et il va littéralement s’accrocher au négatif. Résultat : notre vision du monde est déformée. Nous pensons en général que celui-ci est beaucoup plus sombre et sans espoir qu’il ne l’est réellement.

Processus en cascade

Surtout, la multiplication des informations négatives dans les médias produit des effets nocifs sur notre santé mentale. Il faut reconnaître que notre cerveau n’a pas beaucoup évolué depuis l’époque des chasseurs-cueilleurs. Celui-ci va percevoir l’annonce d’une guerre ou d’un fait divers sordide, par exemple, comme une menace réelle même si ces événements ont lieu très loin de chez nous. Résultat : il va activer notre réponse au stress.

Dans la vie réelle, c’est un processus en cascade dont l’objectif est de nous soustraire à un danger, à une situation difficile que nous vivons. Imaginez : vous vous apprêtez à traverser une rue très fréquentée, et une voiture fonce droit sur vous ! Aussitôt, un flot de neuromodulateurs va déferler en vous : d’abord l’acétylcholine puis l’adrénaline. Cette dernière va contracter les vaisseaux sanguins de notre cœur, qui, à son tour, va se mettre à battre plus vite pour que le sang parvienne plus rapidement vers nos muscles. Et presque instantanément, sans même que vous en ayez conscience, vous sautez sur le trottoir ! Ouf. 

Mais ce n’est pas tout. Un autre processus va s’enclencher. Nos glandes surrénales, juste au-dessus de nos reins, vont diffuser un autre neuromodulateur, le cortisol, qui va activer la formation de glucose nécessaire à notre production d’énergie. Il faut bien soutenir notre réaction sur la durée ! Il s’agit de mettre en condition notre corps pour lui permettre de combattre ou de fuir.

Rumination et anxiété


Mais contrairement à une situation réelle, nous ne pouvons être qu’impuissants face, par exemple, à un massacre qui a lieu à 5 000 km de chez nous. Notre réponse au stress tourne dans le vide. « Nous ne pouvons ni fuir ni affronter le danger, ni prendre de la distance, explique la psychologue clinicienne Sabine Duflo. Et lorsque ces mauvaises nouvelles sont répétées plusieurs fois dans une même journée, nous subissons en continu des minichocs traumatiques. Les tours jumelles à New York ne se sont effondrées qu’une fois, mais pour nous, c’est comme si cela s’était produit des milliers de fois. C’est le même phénomène pour la bande de Gaza. Chaque drame répété inlassablement a des conséquences sur notre santé mentale, cela nous épuise… »

Surtout, les informations négatives s’inscrivent plus profondément dans notre mémoire que les bonnes. Pour pouvoir réagir le plus efficacement possible si le danger se représente, le cerveau emmagasine le maximum de détails sur le contexte : le lieu, les sons, les odeurs. Objectif : déclencher le plus rapidement possible la réponse au stress lorsque la menace reviendra. C’est ce processus qui est à l’origine du syndrome de stress post-traumatique : une odeur, un bruit peut réactiver brutalement le traumatisme.

Sans aller jusqu’à ces extrêmes, tandis qu’une annonce positive sera vite oubliée, une information négative provoquera rumination et anxiété. Or, de nombreuses études ont ainsi montré que ruminer altérait la santé cardio-vasculaire, appauvrissait la qualité du sommeil, stimulait la production d’hormones du stress dont le cortisol. Un tableau qui peut même favoriser la survenue d’une dépression.

source : La Vie

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vendredi 12 avril 2024

Invisible lumière

Et voilà que la nuit
s’annonce sans tapage
elle n’est pas déjà là
non
le jour est encore clair
il sait même se faire éblouissant
reste qu’ici et là

mes narines hument la nuit
alors
que le jour resplendisse
irradie
pour quelque temps encore
avant que de décliner
je voudrais quant à moi
pénétrer gentiment cette nuit
m’offrir à elle sans façons
me livrer à sa vérité
comme je me suis livré
à la vérité du jour
de tout moi même
sans rien garder
yeux grands ouverts
histoire de voir
si au final
nuit et jour ne se confondent pas
en une lumière invisible

Giles Farcet
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jeudi 11 avril 2024

Collaboration au processus...


 "On ne reproduit jamais un éveil ; on ne fait que collaborer étroitement au processus éveillant qui s’est mis en route. Dans la mesure où l’on y collabore de façon profonde, sincère, intelligente, on devient de plus en plus conducteur de ce processus, et on l’incarne de plus en plus. (...)

Il faut reconnaitre que la lumière, l’intelligence de l’éveil n’éclairent en fait que les lieux dont on a ouvert les portes en nous. Ensuite tout le travail consiste à coopérer avec cette dynamique de l’éveil, à ouvrir une à une les portes de toutes les zones obscures pour y faire s’engouffrer la lumière de l’éveil, la lumière de cette intelligence que l’on conserve en soi. Elle est vivante en moi. Au cœur de mon être, je me sais éveillé, je me sais libre, indéniablement. Pourtant, je sais que ce n’est pas suffisant, que je ne suis pas ce qu’en Inde on appelle un « réalisé », c’est a dire un homme définitivement établi dans l’éveil, et qu’il reste encore bien des domaines de ma conscience qui doivent être investis de cette qualité, visités par cette intelligence.

Il m‘est alors apparu évident que ce qui était au cœur de la voie du monde, dans la vie quotidienne, c‘était la relation, et que la pratique consistait à faire de cette relation un travail constant. C’est ce que j’ai appelé la pratique de la « relation consciente ». (...)

Je me suis rendu compte à quel point l’enseignement qui mettait en avant l’éveil comme le but ultime avait tendance a individualiser la démarche et à renforcer l’égoïsme de chacun. Dans mon enseignement, j’ai voulu au contraire que les personnes entrent en relation les unes avec les autres, qu’elles oublient un objectif personnel d’éveil, de libération, et reconnaissent qu’on ne peut grandir qu’ensemble, en prenant le risque de l’autre, en entrant en relation profonde avec l‘autre dans la mesure où celui-ci est l‘occasion d’aller voir ce qu’on n’est pas capable de voir tout seul. (...)

ll se passe quelque chose a partir du moment où l’on n’est plus obsédé par l’éveil et où l’on entre vraiment en relation avec ce qui est. C’est d’ailleurs là que j’ai compris la vraie signification du mot satsang, qui tient une grande place en Inde cela ne se limite pas à la fréquentation du guru, mais c’est élargir le guru à tout ce qui est et fréquenter le réel en tout et partout. Le grand enseignement, le vrai satsang, consiste à vivre en relation consciente avec tout ce qui est ; c’est l’occasion d’un grandir qui, par nature, est de la nature de l’éveil.

En sanskrit, Brahman signifie « grandir », « croître «. Cette dynamique, du fait qu’elle devient prioritaire, nous libère de l’objectif de l’éveil ; on prend peu a peu conscience de la nature réelle du grandir et on se rend compte que cette nature est la réalité. Quand le Christ dit : "Je suis le chemin, la vie, la vérité ", il ne dit pas " Je suis le bout du chemin ", mais " je suis le chemin ". C’est quand on entre dans un grandir constant, qu’on ne cherche plus à atteindre une destination finale, un but, qu’on l’appelle « éveil » ou autrement, que le grandir devient lui-même la conscience vivante dans laquelle tout est inclus. Saint Jean de la Croix disait : « Celui qui s’arrête en quelque chose cesse de se jeter dans le tout. » "

Yvan Amar

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